Dans trois décisions récentes, la Cour de cassation vient rappeler le principe de réparation intégrale en matière de préjudice corporel. Ces décisions, rendues en faveur des demandeurs, clarifient les contours du poste d’assistance par tierce personne sur des points souvent débattus devant les juridictions.
Pour rappel, l’assistance par tierce personne vise à indemniser la perte d’autonomie de la victime la mettant dans l’obligation de recourir à un tiers pour l’assister dans l’ensemble des actes de la vie courante. Cette aide peut être apportée par un professionnel, ou par un membre de la famille de la victime. Le taux horaire d’une aide familiale ne diffère pas en principe d’une aide professionnelle, l’indemnisation doit donc être identique.
Dans la première décision, la passagère d’une motocyclette a subi un accident de la circulation (Cour de cassation, deuxième chambre civile, 15 décembre 2022, n°21-16.712). La demanderesse souffrait de raideurs articulaires et de douleurs qui l’empêchaient de faire ses courses. Son père l’a donc aidée à faire ses courses à la suite de son accident. Dans l’arrêt objet du pourvoi, la Cour d’appel a réduit le nombre d’heure hebdomadaire d’assistance tierce personne au motif que la demanderesse aurait pu utiliser des prestations de livraison à domicile, ces dernières étant plus rapides. La décision a été cassée par la Cour de cassation qui invoque le principe de non-mitigation selon lequel la victime n’a aucune obligation de minimiser son dommage. Le préjudice résultant de l’assistance du père de la demanderesse aurait donc dû être indemnisé intégralement.
Dans une deuxième décision, une victime de vol et de séquestration est indemnisée de ses préjudices corporels par le Fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et autres infractions (FGTI) (Cour de cassation, deuxième chambre civile, 19 janvier 2023, n°20-20.071). Les juges du fond ont exclu toute indemnisation au titre de l’assistance par tierce personne temporaire. Ils ont considéré que la demande au titre de ce poste n’était pas médicalement justifiée. L’expert dans son rapport avait pourtant constaté que le demandeur avait eu besoin d’une assistance familiale à compter du jour de l’infraction et qu’il ne pouvait plus vivre seul. Par conséquent, la Cour de cassation casse partiellement la décision d’appel au visa du principe de réparation intégrale.
Enfin, la Haute juridiction a rendu une décision sur l’indemnisation de l’assistance tierce personne en cas d’hospitalisation du demandeur (Cour de cassation, première chambre civile, 8 février 2023, n°21-24.991). En l’espèce, l’indemnisation des préjudices d’un patient amputé par suite d’une infection nosocomiale a été mise à la charge de l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (l’ONIAM). La Cour d’appel a rejeté les demandes au titre de l’assistance par tierce personne durant l’hospitalisation de la demanderesse. Selon la motivation au fond, un séjour à l’hôpital suspend les contraintes de la vie quotidienne du patient et lui garantit un niveau élevé de sécurité. Toutefois, la Cour de cassation considère que l’assistance tierce personne indemnise la perte d’autonomie dans l’ensemble des actes de la vie quotidienne, ce qui est plus large que les simples besoins vitaux de la victime. Cette décision confirme bien que l’assistance tierce personne au cours d’une hospitalisation doit, par principe, donner lieu à réparation, et ce malgré les avis de certains experts qui refusent encore de l’admettre.
Ces décisions appliquent classiquement le principe de réparation intégrale des préjudices au titre de l’assistance par tierce personne. Ce poste doit donc être caractérisé par la partie demanderesse avec le plus grand soin, afin d’obtenir une indemnisation complète de l’assistance apportée par la famille de la victime ou par des tiers, même au cours de la période d’hospitalisation.
Cet article a été rédigé par notre nouvelle stagiaire, Laure Ekani, élève-avocate.
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